MediaSpecs Summer Interview 7/9 – RMB, la régie qui investit en période de crise

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Lors de notre septième Summer Interview, nous avons rencontré Yves Gérard, Chief Executive Officer de la régie RMB. Pour la Régie Média Belge, créatrice de solutions cross-média pour les médias AB3, La Une, Tipik, Classic 21, NRJ et bien d’autres, deuxième régie publicitaire au sud du pays, cette rencontre était l’occasion de nous parler de l’actualité qui fait mouche depuis peu : l’annonce faite par VIA d’un nouvel « écosystème vidéo » impliquant tous les diffuseurs belges. Une annonce marquante concernant l’implémentation de spots publicitaires unskippables qui n’a pas manqué de faire réagir.

Un nouveau paradigme pour la pub TV

Pour Yves Gérard, l’union présentée dans le communiqué de VIA amorce un véritable changement de paradigme dans l’audiovisuel. Pour la première fois, le secteur se fédère face aux GAFA. Leur objectif commun est de revaloriser la couverture publicitaire afin de continuer à soutenir les contenus et médias locaux face aux rivalités internationales. La collaboration avec les TelCo comme Proximus, Voo et Telenet va ainsi permettre l’accès à de nombreuses datas et donc, d’explorer de nouveaux horizons en termes de publicité ciblée, en contrepartie de programmes originaux et forts. Dans le nord, Telenet est le premier acteur à se lancer dans l’aventure. Il est néanmoins essentiel de noter que tous les acteurs belges impliqués dans l’audiovisuel (régies et chaînes) ont signé un accord commun.

« Ce projet permettra deux choses importantes : d’abord, d’ajouter du reach auprès des téléspectateurs qui enregistrent leurs programmes avec un preroll d’une minute, et ensuite, lors des replays de ne plus pouvoir zapper les pubs. L’objectif est de rattraper la perte de la TV linéaire face aux plateformes. Notons que 35% de l’audience ne regarde plus la télé en direct, mais en différé. »

Un autre objectif est d’être ensemble pour offrir le nouvel outil de demain, entre régies, pour les datas, et dans la vision globale de la gestion de la publicité télévisuelle.

Crise et risque, un challenge gagnant pour RMB

En 2019, suite à un voyage aux États-Unis (à New York plus précisément) organisé par l’EGTA, RMB a initié une réflexion sur le rapport entre la télévision et le digital. Une mutation était en cours, avec le constat d’une approche inversée : on ne partait plus du média pour toucher des individus, mais bien des individus et de la data liée à ces personnes afin d’identifier le meilleur canal pour les toucher. Cela changeait tout : les modèles de commercialisation, de planification, de projection ROI, etc. nécessitaient d’être revus. Une évidence apparaît ; la télévision se digitalise, et RMB souhaite bien réinventer son modèle afin de répondre à cette transition. Tous ces besoins ont d’abord été traduits dans un RFP (Request For Proposal). Afin de satisfaire les annonceurs dans leurs nouvelles attentes, plus de data seront exploitées.

Dans ce cadre-là, RMB envisage quatre stratégies d’achats possibles : premièrement, le modèle traditionnel d’achat d’écrans publicitaires, deuxièmement, l’achat de l’adressable TV, troisièmement, l’achat d’ad replacement, et enfin, permettre l’achat programmatique aux trading desks en real time bidding. « L’objectif est que nos médias linéaires puissent devenir des médias qui répondent aux codes digitaux, mais avec la puissance des couvertures locales. »

C’est sur ce fond de révolution en interne que la covid a fait son apparition. La crise a commencé alors que la régie venait de clôturer son RFP (Request For Proposal) pour son nouveau projet. La question s’est vite posée de prendre le risque de continuer à investir dans ce projet, ou de préserver les budgets. RMB prend alors la décision de tout parier sur le challenge, afin d’innover même en temps de crise. Ceci étant dit, RMB n’a pas négligé son entreprise traditionnelle pour autant, s’engageant formellement à préserver l’emploi par exemple. Les chiffres de 2020, comme pour toutes les régies, ont souffert de la crise, avec une baisse importante lors des premiers mois du coronavirus, aplanie à environ 14% de perte en fin d’année. Un bilan somme toute satisfaisant au vu des conditions exceptionnelles.

Les résultats de ce nouveau challenge devraient être étalés sur deux ans, mais commencent déjà à aboutir actuellement avec entre autres le développement d’un OMS digital (Order Management System). 2021 apportera plus de matière à ce projet. Yves Gérard ne regrette pas la décision de RMB ni sa position face à la crise : prudence et innovation a été une combinaison fructueuse pour eux jusqu’à présent, et leur a semblé un choix judicieux et pertinent par rapport au fait que RMB peut continuer aujourd’hui à se projeter demain.

Une remarque cependant permet de revenir sur les dégâts de la crise subie par les régies audiovisuelles :

« C’est certain, le business a souffert en 2020, principalement la télévision. La radio n’a pas perdu d’audience, au contraire, mais les annonceurs ont été plus frileux avec ce média en période de télétravail. Quant au digital, il n’a pas encore été récompensé à hauteur d’espérance. Ce qui est regrettable, c’est le manque de soutien belge pour les acteurs locaux. Ceci a donc bénéficié aux acteurs internationaux et aux GAFA. Ça n’empêche que nous avons avancé dans la tempête. »

Une vision tournée vers l’avenir

Chez RMB, 2021 a été vue avec prudence, comme une année de convalescence. L’année a commencé doucement, stabilisant dans un premier temps la télé, mais laissant la radio en souffrance suite à la perte de confiance des acheteurs basée sur l’idée erronée que sans les morning/evening drive times, la radio avait perdu des auditeurs, tandis que le télétravail a au contraire ajouté des heures d’écoute (le CIM ayant prouvé que ce temps d’écoute a augmenté). La seconde partie du semestre a vu une réelle relance, avec une explosion du digital et de la télévision au deuxième trimestre. Cette augmentation a été leadée par des évènements sportifs forts, tels que l’Euro 2020 ou les JO, mais aussi par un regain d’investissements. La rentrée s’annonce donc positive, avec un objectif : l’amélioration du reach TV, sans saturer les écrans.

« Tout indique que 2021 pourrait être une bonne année, mieux qu’une année de convalescence. Malheureusement, nous faisons face à un manque de visibilité. Néanmoins, nous constatons un regain de confiance en le média TV qui reste un indispensable des marques, et un record en digital local, ce qui nous encourage pour l’avenir. Il y aura un avant et un après-covid, c’est une certitude. »

Face à la question de l’accélération de la transition digitale en période de covid, Yves Gérard est serein, et envisage plutôt la situation comme une évolution naturelle du marché. En effet, cette transformation ayant déjà été amorcée les années précédentes, la révision du modèle business de la régie dans sa globalité serait inévitablement arrivée. « Certes, la crise du covid nous a poussés à réagir et nous réinventer, principalement dû à l’effet de déport d’investissement vers les GAFA. Nous avons voulu reprendre notre destin en main, et collaborer avec les acteurs locaux pour avancer ensemble, nous fédérer. » La conviction de la régie que la transition ne peut se faire qu’ensemble s’est renforcée, tout comme chez ses concurrents.

Cette crise aura également poussé les Hommes à se réunir, à prendre conscience de la valeur de l’union et de la solidarité. La covid aura provoqué bien des réflexions et des remises en question, dont la principale est de valoriser les collaborations intelligentes.

Face aux risques de demain, tels que l’arrivée d’un super géant tel que DPG/Rossel, Yves Gérard reste positif et a foi en le pouvoir du local. Pour lui, tout avantage pour renforcer et protéger le marché belge en restant pertinent, à l’instar de nos voisins, est positif.

Et demain, plus encore…

Chez RMB, beaucoup d’innovations vont arriver. Les chaînes en portefeuille de la régie produisent déjà beaucoup de programmes locaux et originaux, à l’instar de VTM du côté flamand. Bien que l’attente locale francophone soit moins attachée aux productions belges que nos voisins néerlandophones, ces programmes connaissent un certain succès. Un équilibre doit être trouvé, ce qui promet un avenir intéressant. Parmi les nouveautés francophones dans leur ensemble, la plus connue, et attendue, est bien entendu la fameuse Coupe du Monde en novembre dans des tranches horaires et une période idéale pour l’audience.

Concernant les projets de la régie, il y a bien sûr ce projet digital qui s’inscrit dans le grand renouvellement de l’ERP (Entreprise Ressource Planning) jusqu’à fin 2022. Mais il y a également un autre challenge, qui concerne le développement de l’offre publicitaire. En effet, il existe déjà un département créatif chez RMB, intitulé FLASH : Feel Like A Super Hero. Celui-ci travaille à tout ce qui est déformatage publicitaire, c’est-à-dire d’utiliser le brand content, les influenceurs, réseaux sociaux, etc en plus des médias traditionnels. Le but est de faire passer ce service des 3-4% du CA actuel, à du 7-8% prochainement. Il y a beaucoup de marchés pour cette tendance. Un autre axe de développement pour le futur est évidemment de continuer à développer l’offre digitale, dans le but d’atteindre les 15% du CA afin de compenser le risque sur les autres médias traditionnels.

Un dernier évènement est à souligner, et MediaSpecs en profite pour transmettre ses félicitations, c’est l’arrivée des 30 ans d’Yves Gérard au sein de RMB. La régie a donc encore de jolis projets à célébrer et mettre en place demain.

Retrouvez l’offre complète de RMB sur notre base de données MediaSpecs.