
Lors du BAM Marketing Congress 2024, l’experte en ESG, Caterina Occhio, s’est donnée la tâche difficile mais nécessaire d’informer les marketeurs sur la Green Claim Directive qui va ébranler le greenwashing en Europe. Elle a également partagé ses réflexions avec MediaSpecs.
Forte de son expérience avec des organisations comme les Nations Unies, des marques de luxe telles que Chloé, et en tant que fondatrice d’entreprises éthiques comme SeeMe et EthicaRei, Caterina Occhio a mis en lumière les implications majeures de la nouvelle directive européenne sur les allégations écologiques pour les professionnels du marketing.
« This directive is not just another regulation—it’s a game changer », a-t-elle déclaré, soulignant qu’elle marque la fin du greenwashing tel qu’on le connaît. « Les normes d’application volontaires, c’est terminé. D’ici 2027, vous devrez justifier chaque allégation environnementale par des preuves claires et vérifiables. »
Combattre le greenwashing : La voie à suivre
Le problème est largement répandu : « Cinquante-trois pour cent des allégations écologiques aujourd’hui sont vagues, trompeuses ou infondées », explique Caterina Occhio. « Les consommateurs sont perdus et la confiance s’érode. Cette directive est une réponse nécessaire pour assainir notre industrie. »
« Greenwashing is not just bad for the end consumer; it’s bad for the whole industry, because you undermine trust » – Caterina Occhio
En mentionnant des exemples courants de greenwashing – comme des labels de durabilité non vérifiables et des termes vagues tels que « eco-friendly » –, Caterina Occhio a mis en garde contre les sanctions sévères à venir. Les entreprises non conformes pourraient être sanctionnées par des amendes allant jusqu’à 4% de leur chiffre d’affaires annuel, et les récidivistes risquent de perdre leur accès aux marchés publics.
« Cette tendance est à son maximum dans les supermarchés », a-t-elle noté. « On peut jouer à un jeu en vérifiant, sur n’importe quel rayon de supermarché, combien de produits affichent des allégations de durabilité. »

La récente étude Greenlight par RMB, JCDecaux et GiveActions, s’est emparée de cette nouvelle directive pour analyser le risque de greenwashing dans les publicités des deux régies, fournissant ainsi des insights spécifiques au marché belge.
De la conformité à l’opportunité
Plutôt que de voir ces changements comme une contrainte, Caterina Occhio invite les marketeurs à les percevoir comme des opportunités.
« Marketeers and companies should stop being afraid and embrace change » – Caterina Occhio
Elle ajoute : « Il y a des entreprises comme Patagonia qui ont décidé d’emprunter une voie différente. Elles continuent de gagner de l’argent, mais elles sont l’une des marques les plus durables au monde. Si elles peuvent le faire, pourquoi pas vous ? »
Caterina Occhio a mis en garde contre une approche minimaliste : « Il y a deux mauvaises réactions courantes dans les entreprises : soit le déni, soit la conformité. La seconde signifie : ‘Nous ne ferons que ce que la législation exige.’ Le danger de la conformité, c’est de passer à côté de l’esprit de la législation : s’assurer que le modèle économique ne nuit plus à la planète et aux gens. On tombe alors dans un exercice de ‘cocher des cases’, et c’est le vrai danger. »

Un autre risque, selon elle, est de n’appliquer ces changements que de manière sélective. « Il y a un risque que les entreprises commencent à produire selon les règles uniquement pour l’Europe, sans rien changer pour le reste du globe, là où les législations ne le requièrent pas. Mais pourquoi ne pas saisir cette opportunité de changement et en faire un argument de vente unique pour votre marque ? »
Naviguer dans ce changement : Conseils clés pour les marketeurs
Caterina Occhio a partagé des recommandations pratiques pour aider les marketeurs à se préparer à cette transformation :
- Auditer les pratiques actuelles : Vérifier toutes les allégations environnementales existantes pour conformité et supprimer celles qui sont vagues ou non vérifiables.
- Investir dans des données mesurables : Collaborer avec les chaînes d’approvisionnement et les équipes de durabilité pour collecter des évaluations précises des cycles de vie.
- Favoriser la transparence : S’assurer que les allégations sont vérifiées par des tiers pour restaurer la confiance des consommateurs.
- Utiliser la durabilité comme un différenciateur : Transformer la conformité en opportunité de branding en mettant en avant un véritable leadership environnemental.
Elle prévient également ceux qui tarderaient à agir : « Beaucoup d’entreprises sont dans le déni. Leur attitude est : ‘On verra bien’, ou ‘Nous nous en occuperons lorsque les règles seront claires.’ Mais plus vous attendez, plus cela devient coûteux, et plus le travail sera mal fait car vous devrez vous précipiter. Je vous le dis : le tsunami arrive demain ! »
Un tsunami de changements
Caterina Occhio a souligné que la directive sur les allégations écologiques s’inscrit dans une tendance plus large au sein de l’UE, avec une vague de législations visant à renforcer la transparence et la responsabilité. « Il s’agit de l’une des 22 directives à venir. Une autre se concentre sur les allégations sociales, s’assurant que les déclarations sur la diversité et l’inclusion sont soutenues par des résultats mesurables », a-t-elle expliqué.
Elle a rappelé le rôle crucial des marketeurs dans cette transformation : « Le législateur dit ceci : la responsabilité ne repose pas sur le consommateur, qui devrait faire ses propres recherches. La responsabilité incombe à celui qui utilise le greenwashing pour vendre plus — en capitalisant sur la bonne volonté des gens pour leur vendre davantage. »
Un défi à relever
Les propos de Caterina Occhio ont mis en avant le rôle essentiel des marketeurs dans cette nouvelle ère de responsabilité. Ses analyses ont souligné le potentiel de la directive pour remodeler le secteur, en favorisant non seulement la conformité, mais aussi une culture de transparence et d’innovation.
« We’re not just selling products; we’re selling trust. Let’s make sure that trust is deserved » – Caterina Occhio
Dans le contexte d’une urgence climatique grandissante où les consommateurs et les législateurs s’intéressent de plus en plus à la responsabilité des entreprises, une chose est claire : la directive sur les allégations écologique n’est pas seulement un obstacle pour les marketeurs, mais une opportunité de mener le changement vers un avenir plus durable et digne de confiance.