La crise du Covid-19 met à mal la survie des radios indépendantes et le DAB+

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La Fédération RadioZ, qui regroupe une trentaine de radios indépendantes en Fédération Wallonie-Bruxelles, publie aujourd’hui les résultats d’une étude réalisée auprès des radios indépendantes et tire la sonnette d’alarme quant à leur pérennité. Avec la crise du Covid-19, certaines pourraient ne pas survivre tandis que d’autres envisagent d’abandonner la diffusion en DAB+, une technologie pourtant vouée à remplacer la FM d’ici quelques années.

Un service public qui assure proximité et diversité

Les radios indépendantes représentent aujourd’hui 12% de l’audience radio en Belgique francophone, sont soutenues par de nombreux bénévoles (une trentaine en moyenne par station) et créent également de nombreux emplois. Ces radios assurent un service public alliant proximité et diffusion des artistes locaux et de la Fédération Wallonie-Bruxelles. Dans la situation de confinement, ces radios locales sont par exemple les seuls médias à relayer gratuitement des informations de proximité d’intérêt général et des initiatives solidaires émanant d’administrations communales et d’autres acteurs locaux de leur région. De plus, elles diffusent gracieusement diverses campagnes d’information et de sensibilisation par rapport au Covid-19.

La crise fragilise grandement les radios indépendantes

Si ces radios remplissent une mission indispensable dans les régions qu’elles couvrent, les conséquences du Covid-19 font apparaître de graves difficultés qui vont jusqu’à mettre en péril la viabilité d’un très grand nombre d’entre elles. Leurs revenus annuels, qui varient entre 10.000 et 400.000 euros, reposent sur la vente d’espaces publicitaires locaux, l’organisation ou l’animation d’événements, la tenue de bars, la vente de cartes de membres, etc. voire de subsides communaux, provinciaux, ou universitaires dans certains cas.

Sans surprise, les nombreuses radios qui ne vivent que de rentrées publicitaires, d’événements ou de bars sont fortement impactées par l’annulation de nombreux événements jusqu’à septembre (au moins) et par le confinement que l’on connaît depuis le mois de mars. Pour les radios existant depuis le plan de fréquences 2008 ou avant, la perte annuelle est estimée à 50% en moyenne et va jusqu’à atteindre 80% du revenu annuel. Pour celles qui ont été autorisées en juillet dernier avec le nouveau plan de fréquences, la perte estimée pourrait atteindre 100%.

D’autres plus minoritaires, appelées associatives, reçoivent un subside annuel de plus ou moins 20.000€ de la FWB. Celles-ci sont donc moins menacées si ce n’est qu’elles risquent de voir leur subside fortement diminuer. En effet, celui-ci est payé par le FACR (fond d’aide à la création radiophonique) selon un pourcentage des recettes publicitaires de la RTBF et des réseaux privés, qui seront également en baisse pour cette année.

Un soutien public indispensable

La viabilité de très nombreuses radios indépendantes est donc menacée avec toutes les conséquences pour la diversité du paysage radiophonique, les auditeurs, les bénévoles et les personnes rémunérées.

Jeudi dernier, la ministre Linard, en charge de l’Audiovisuel en Fédération Wallonie-Bruxelles, a toutefois annoncé un plan de soutien de 3 millions d’euros pour indemniser les médias dont la viabilité est menacée en raison de la crise du Covid-19, et s’est aussi notamment engagée à acheter des espaces publicitaires pour une campagne de communication d’intérêt public dans l’ensemble des médias. « C’est une bonne nouvelle pour les radios indépendantes », se réjouit Philippe Sala, porte-parole de RadioZ. « Nos radios membres attendent à présent les modalités pratiques pour pouvoir solliciter cette aide indispensable ».

Par ailleurs, la Fédération RadioZ insiste sur d’autres mesures qui devraient être prises par la ministre et le gouvernement de la Fédération Wallonie-Bruxelles :

  • La garantie que toutes les radios indépendantes associatives restent subsidiées à la même hauteur jusqu’à l’annuité de 2021, et ce quels que soient les montants des rentrées publicitaires des réseaux privés et de la RTBF que le FACR va redistribuer. Payé au début de cette année, le montant du subside 2018 s’élevait à 22.014,76.
  • La garantie d’un subside annuel récurrent de 10.000€ à toutes les radios indépendantes non associatives pour leur permettre de couvrir une partie des frais de base indispensables à leur survie et ainsi garantir la diversité du paysage radiophonique de la FWB.
  • L’intervention promise par la ministre de l’audiovisuel auprès du fédéral en ce qui concerne ses compétences, mais aussi auprès des sociétés en charge des droits d’auteurs (Sabam) et droits voisins (PlayRight) pour demander à titre exceptionnel que ces organismes annulent les redevances 2020. Les radios indépendantes font en effet de leur côté déjà un maximum pour mettre en avant la création artistique auprès de leurs auditeurs au quotidien pour soutenir les artistes et créateurs.

La diversité du DAB+ est clairement en danger

Dans ces conditions, les radios n’imaginent pas un avenir très rose en DAB+.  50% des radios répondantes affirment ne pas pouvoir se permettre de lancer leur diffusion en DAB+ et 42% comptent se lancer, mais non sans un possible retour en arrière dans le cas où leurs finances ne leur permettent plus d’assurer les coûts récurrents liés à la diffusion en DAB+.

Cette norme étant préconisée à l’échelle belge et européenne pour remplacer à terme la FM, un subside de la Fédération Wallonie-Bruxelles pour couvrir les investissements de départ, a été obtenu suite aux demandes de la Fédération RadioZ, mais est toujours bloqué à ce stade. Les radios indépendantes sont donc autorisées en DAB+, mais n’ont toujours pas la possibilité d’y émettre. De plus, la quasi-totalité des radios indépendantes craint de ne pas pouvoir assumer les coûts annuels récurrents tels que les locations de sites d’émission, la consommation électrique de la technologie, l’entretien du matériel et la rémunération des droits d’auteurs…

Philippe Sala insiste dès lors sur « l’indispensable nécessité que la Fédération Wallonie-Bruxelles prenne en charge les frais annuels récurrents, à payer à l’opérateur futur, pendant cette première période de 9 ans d’autorisation à émettre en DAB+. Cette norme reste une nécessité pour les radios indépendantes intéressées et une solution pratique doit être trouvée rapidement pour arrêter l’iniquité actuelle face aux réseaux privés et la RTBF, qui y émettent déjà depuis plus d’un an ! Il ne faudrait pas que la crise du Covid-19 retarde encore plus l’installation et empêche même certaines radios d’opter pour le DAB+ choisi comme nouveau standard par la Fédération Wallonie-Bruxelles. »