Interview par WE MEDIA : Des éditeurs B2B sur la diversification de leur métier

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Le coronavirus a forcé tout le monde à réfléchir et agir différemment. Les éditeurs B2B aussi. Comment se présente leur mix aujourd’hui ? Qu’ont-ils appris ces deux dernières années ? Et comment leur métier évolue-t-il ?

Autour de la table, nous avons réuni la crème de la crème de la presse professionnelle dans notre pays : Jan Bamelis (Director chez Roularta Healthcare), Philippe Masscheleyn (Directeur Communication chez Boerenbond) et Andy Noyez (Director chez Professional Media Group).

Comment votre mix a-t-il changé durant ces deux dernières années et demie ?

Jan Bamelis : Il a fortement changé. Avant le début de la pandémie du coronavirus, Roularta Health n’avait pas organisé tant d’événements, mais dès que la crise est survenue, on nous a rapidement demandé de mettre sur pied des événements numériques. L’activité n’a cessé de croître, allant jusqu’à plus de 200 événements studio en 2 ans de temps. Entre-temps, les webinars et livestreams se sont taillés une part de 20 % de notre chiffre d’affaires et nous continuons d’innover, tant en interne qu’avec des partenaires externes.

Dans nos médias réguliers – imprimés et en ligne -, nous avions l’avantage que pour notre public cible des professionnels de la santé l’actualité ne perdait évidemment jamais de son intérêt. Les annonceurs sont dès lors restés présents.

Andy Noyez : Pendant le corona, nos événements de contenu sont devenus des évents numériques, et il s’agit là d’une évolution réussie. Nous constatons que l’audience est bien plus importante. Côté awards, c’est une autre histoire. Là, on ressent un besoin de réseautage, d’ambiance. À mon avis, l’avenir sera aux événements hybrides.

Dans les médias, l’on-line a continué à s’étendre ; nous avons créé une dizaine de nouveaux outils de communication dédiés. Le print a perdu du terrain, même si nous constatons un revirement en 2022, entraînant à nouveau une légère augmentation des revenus publicitaires, ce qui confirme l’importance du print. En outre, nous jouons la carte des abonnés payants. Quiconque s’enregistre, se voit offrir l’accès non seulement à l’information, mais aussi à la recherche et aux études.

Enfin, depuis peu nous nous focalisons davantage sur les formations à travers des workshops, tant digitaux que physiques. Nous avons aussi développé un nouvel outil qui permet aux écoles et aux entreprises de créer leurs propres cours ou d’utiliser des cours de base dans le cadre de leurs formations.

Philippe Masscheleyn : Avant, chez nous, le focus était mis sur l’hebdomadaire Boer&Tuinder. Nous nous sommes numérisés à toute vitesse, ce qui nous a par exemple amenés, en 2021, à envoyer 400 newsletters à nos différentes cibles.

Pour nos événements, nous sommes passés au numérique, avec jusqu’à 1.000 visiteurs pour un webinar et un programme TV en remplacement de notre événement de réseautage annuel. Les clips de notre Dag van de Landbouw digital, qui normalement attire chaque année quelque 100.000 visiteurs dans nos entreprises agricoles et horticoles, ont été visionnés jusqu’à 250.000 fois.

Vous êtes clairement satisfaits de l’impact des webinars et autres événements numériques. Seront-ils maintenus ?

Andy Noyez : Aujourd’hui, pour les événements de contenu nous misons sur une approche hybride. Le live a la primeur, l’événement pouvant aussi être suivi en ligne quelques jours plus tard. Nous réservons ainsi la primeur à qui est présent en live.

Philippe Masscheleyn : La partie digitale reste présente dans tout ce que nous faisons, aussi côté événements. Cela nous garantit en effet une audience supplémentaire. Et puis, vous offrez au lecteur/auditeur/surfeur le canal qui a sa préférence.

Andy Noyez : Avant, on décidait pour le lecteur quel était le canal via lequel il recevait le contenu. Aujourd’hui, c’est le lecteur qui en décide. Souvent, il optera pour son smartphone.

Vous restez positifs au sujet des revenus publicitaires, n’est-il pas vrai ? Quelles évolutions percevez-vous ?

Philippe Masscheleyn : Pour nous aussi, 2020 et 2021 ont été des années assez normales, mais en 2022 nous ressentons un revirement. Le print se porte moins bien, tandis que pour la première fois l’on-line est utilisé de façon structurelle.

Andy Noyez : En outre, il y a la tendance de passer d’annonces vers des récits de marque ou la publicité native. Si cette tendance est bien évidemment inspirée par l’impact supérieur, je reste partisan d’une combinaison entre annonces, publicité native et publicité de marque.

Je constate enfin que les vidéos remplacent de plus en plus souvent les photos dans un contexte publicitaire. Tant au niveau digital qu’en print. On est en mesure de fournir beaucoup plus de détails et avec les codes QR on peut y référer en partant du print.

Jan Bamelis : Cela fait déjà pas mal de temps que Roularta Healthcare plaide pour la publicité native et les testimoniaux : cela permet à un annonceur d’ajouter de la valeur par rapport à une publicité classique. Il convient toutefois de prendre en compte deux éléments : l’indépendance de la rédaction doit être garantie et on ne peut insérer trop de publicités natives pour ne pas perturber l’équilibre entre contenus rédactionnels et commerciaux.

Je suis en outre intimement persuadé que les nouvelles technologies nous aideront à l’avenir. Les codes QR sont entre-temps largement utilisés, mais la RV et la RA offrent également un tas de possibilités à qui cherche à porter le print à un niveau supérieur. Nous étudions actuellement ce qui est envisageable. Le pharma est un secteur intéressant pour ce type d’applications, mais nous examinons si tout cela est aussi possible sur le plan réglementaire.

Philippe Masscheleyn : La RV fonctionnerait aussi bien dans le secteur agricole ; nous nous y sommes d’ailleurs déjà essayés. Pensez à un clip en réalité virtuelle qui vous montre comment conduire un engin agricole en toute sécurité vis-à-vis des autres usagers.

Les nouvelles technologies vont transformer votre métier. Y aura-t-il encore de la place pour le print dans 5 ans ?

Jan Bamelis : Absolument, mais à condition que nous placions la latte plus haut et enrichissions le contenu. Dans cette optique, le produit imprimé restera certainement un élément de base dans le mix.

Philippe Masscheleyn : Pour moi, le print est le ciment de tout ce que l’on fait. Il permet de proposer des récits étayés à travers tous nos sous-secteurs différents.

Andy Noyez : Peut-être qu’avec le print nous pénétrerons encore plus loin dans la niche, que nous proposerons encore plus d’éditions balisées. Le fait que nous ayons commencé à publier des livres prouve d’ailleurs que nous croyons toujours au print. On ne s’y décide pas si on ne croit pas au papier…

Quel est votre avis sur l’avenir de la presse professionnelle ? En B2B surtout, chaque marque semble s’être muée en éditeur.

Philippe Masscheleyn : C’est exact, mais personne n’a le temps de se mettre à la recherche de l’information. C’est justement ce qui incombe à un éditeur professionnel. Celui-ci sélectionne l’information pour vous. Cette position forte, nous l’occupons toujours.

Jan Bamelis : J’entrevois des possibilités pour encore élargir notre rôle, parce que nous sommes proches de nos clients. Maintenant qu’en tant qu’éditeurs B2B nous proposons une palette de possibilités toujours plus large, nous pouvons nous-mêmes intervenir en tant que conseiller média et proposer une approche tout-en-un au client, le soulager sur toute la ligne. Ainsi, le client en aura plus pour son argent et nous créons une situation win/win.

À côté de cela, il est aussi un fait qu’on ne survit plus avec les seuls revenus publicitaires. Actuellement, nous planchons dès lors assidûment sur notre politique d’abonnements pour convaincre les 35.000 professionnels de la santé de ce pays de s’abonner.

Andy Noyez : Ça prend de plus en plus d’importance chez nous aussi. La base reste cependant la même : un bon contenu et un développement judicieux de vos canaux sont essentiels pour développer un lectorat clair. Cela offre une garantie de visibilité à vos annonceurs.

Quiconque traite le contenu de marque comme du contenu rédactionnel ne réussira pas dans ce dessein. Qui veut diminuer ses tirages pour réduire les coûts, non plus.

Source : www.wemedia.be.